
Près d’un an et demi après le terrible tremblement de terre qui a frappé la région d’Al Haouz au Maroc, causant la perte de 3000 vies humaines, près de 6000 blessés, des milliers d’orphelins et un nombre incalculable de familles sans abri, la situation reste alarmante. La reconstruction des zones sinistrées avance à un rythme décevant, malgré les promesses d’un programme ambitieux et les sommes colossales annoncées pour la réhabilitation des infrastructures et des habitations. En dépit des efforts de communication mis en place par le gouvernement, de nombreuses questions demeurent sans réponse. Où en est réellement le programme de reconstruction, et pourquoi les zones sinistrées restent-elles dans l’ombre du processus de récupération ?
La lente progression de la reconstruction
Le tremblement de terre d’Al Haouz a laissé derrière lui des paysages dévastés, avec des villages entiers détruits et des infrastructures vitales complètement anéanties. Pourtant, près de 18 mois après la tragédie, l’opération de reconstruction piétine. Le gouvernement a créé plusieurs structures pour gérer cette crise, dont le Fonds spécial pour la gestion des effets du tremblement de terre, l’Agence de Développement du Haut Atlas (ADHA) et le Fonds de solidarité contre les événements catastrophiques (FSEC). Ces entités sont chargées de gérer l’allocation des fonds et la mise en œuvre du programme de reconstruction. Cependant, elles communiquent peu, voire pas du tout, sur l’état réel des projets.
Les informations disponibles à ce jour sont parcellaires et souvent contradictoires. Les autorités n’ont pas fourni de détails clairs sur les 120 milliards de dirhams promis dans le programme de reconstruction. Combien de ces fonds ont été effectivement dépensés ? Où sont passées les sommes promises, notamment les 3 milliards de dirhams mobilisés par le FSEC ? À ce jour, la population et les médias restent dans l’ignorance sur l’utilisation effective de ces montants.
Une communication événementielle sans substance
En dépit des nombreuses conférences de presse et des points de communication officiels, la transparence fait défaut. Des reports de « réalisations » comme l’avancement des stades et des infrastructures routières sont fréquemment mis en avant, surtout dans le cadre des préparatifs de la Coupe du monde 2030, que le Maroc coorganisera avec l’Espagne et le Portugal. Toutefois, ces projets semblent avoir accaparé toute l’attention des responsables, au détriment de la reconstruction des zones sinistrées. Pendant ce temps, des milliers de familles continuent de vivre dans des conditions précaires, souvent sous des tentes en plastique ou en toile, mal protégées contre le froid glacial des montagnes du Haut Atlas.
Des milliers de familles oubliées
À Al Haouz, des milliers de familles sinistrées vivent toujours dans l’incertitude. Le froid hivernal, les intempéries et l’absence d’un abri permanent rendent la situation particulièrement difficile pour les plus vulnérables. L’absence de solutions d’hébergement durables, telles que la reconstruction de maisons ou l’aménagement de logements temporaires de qualité, laisse les sinistrés dans un état de désarroi profond.
Les promesses de relogement et de réhabilitation semblent avoir été reléguées au second plan, avec un rythme de reconstruction beaucoup plus lent que prévu. Les populations des zones affectées ne cessent de demander des comptes, en particulier sur l’usage des fonds alloués et sur les délais de réalisation des projets de réhabilitation. En attendant, des familles entières sont toujours contraintes de vivre dans des conditions indignes et de subsister dans l’attente d’une aide qui semble s’éloigner chaque jour.
Le silence des autorités et l’inaction apparente
L’opposition politique semble aussi préoccupée par les répercussions sociales de la lenteur du processus de reconstruction. Pourtant, son silence sur le sujet, ou ses déclarations parfois timides, ajoutent à la frustration des populations sinistrées. Alors que le pays se targue de ses capacités à organiser un événement international comme la Coupe du monde, les conditions de vie dans les zones frappées par la catastrophe montrent un contraste saisissant. Les citoyens se sentent abandonnés et délaissés par les autorités, avec une gestion qui semble plus intéressée par l’image et l’événementiel que par la réparation concrète du tissu social et économique des régions affectées.
Vers une prise de conscience collective ?
La situation actuelle laisse place à de nombreuses interrogations sur la gestion des crises nationales. Alors que le pays se prépare à des défis internationaux comme la Coupe du monde 2030, il est essentiel de ne pas oublier les milliers de Marocains qui, eux, vivent encore dans les décombres de cette tragédie. Il devient impératif que le gouvernement redouble d’efforts pour garantir la transparence, accélérer la reconstruction et répondre aux besoins urgents des populations sinistrées.
Il est de la responsabilité des autorités publiques de rendre des comptes, d’ouvrir les lignes de communication, et de garantir que l’argent destiné à la reconstruction soit effectivement utilisé pour reconstruire les vies brisées par cette catastrophe. La lenteur actuelle ne peut plus durer, et l’urgence de la situation nécessite une réévaluation sérieuse des priorités et des actions à entreprendre pour redonner espoir à ces familles oubliées.