La Centrale Solaire Noor Ouarzazate III : Un Arrêt Forcé et ses Répercussions

La Centrale solaire Noor Ouarzazate III, l’une des plus grandes installations solaires à concentration thermodynamique (CSP) en Afrique, traverse une crise importante depuis le début de l’année 2024. En raison d’un problème technique majeur sur son réservoir de sels fondus, la centrale reste hors service et son redémarrage, initialement prévu pour novembre 2023, a été repoussé à avril 2025. Cet incident, qui s’est avéré plus grave que prévu, a non seulement entravé la production d’énergie mais a également entraîné des pertes financières substantielles pour les parties prenantes, notamment Acwa Power, l’actionnaire majoritaire de la centrale.

Le Problème Technique et les Conséquences de l’Arrêt

Au premier trimestre de 2024, un dysfonctionnement au niveau du réservoir de sels fondus de la centrale a conduit à un arrêt prolongé de l’exploitation de la centrale. Ce réservoir, qui stocke l’énergie thermique produite par les miroirs solaires pour permettre à la centrale de continuer à produire de l’électricité même en l’absence de soleil, constitue un élément clé du fonctionnement de la centrale. Selon le groupe saoudien Acwa Power, qui détient 75 % de la Société de projet Acwa Power Ouarzazate III (APO III), la remise en service de la centrale ne devrait pas intervenir avant la fin du premier trimestre 2025.

Le coût initialement estimé des pertes financières liées à cet arrêt était de 47 millions de dollars, mais les dernières évaluations ont porté cette somme à plus de 51 millions de dollars. Ces pertes incluent la perte de valeur de la centrale, dont 143,7 millions de rials saoudiens (environ 38 millions de dirhams marocains) sont directement imputés à Acwa Power.

La Centrale Noor Ouarzazate III : Un Projet Ambitieux

La Centrale Noor Ouarzazate III fait partie du complexe Noor Ouarzazate, un projet phare du Maroc visant à devenir un leader mondial en matière d’énergies renouvelables. Mise en service en octobre 2018 (avec un retard par rapport à la date initiale de novembre 2017), Noor Ouarzazate III a une capacité brute de 150 MW et utilise la technologie solaire thermique à concentration (CSP) avec stockage d’énergie thermique à sels fondus. Elle est capable de fournir de l’électricité pendant 7 à 8 heures sans radiation solaire, notamment en soirée, lorsque la demande en électricité est élevée.

La centrale doit alimenter environ 500.000 foyers marocains et représente un des principaux atouts dans la stratégie énergétique du pays. Elle fait partie d’un ensemble de projets de production d’énergie renouvelable qui visent à diversifier les sources d’énergie et à réduire la dépendance aux énergies fossiles.

Les Antécédents de Pannes et de Réparations

La Centrale Noor Ouarzazate III n’est pas étrangère aux incidents techniques. Dès ses premières années de fonctionnement, elle a rencontré des problèmes, notamment des fuites de sel fondu en juin et juillet 2019. Ces fuites ont nécessité une longue période d’indisponibilité pour inspection et réparation entre juin 2019 et mai 2020. Ces incidents soulignent la complexité de la technologie CSP et l’importance d’une maintenance rigoureuse pour garantir la continuité de la production d’énergie.

Le Coût de la Construction et les Bailleurs de Fonds

La construction de la Centrale Noor Ouarzazate III a coûté 7,18 milliards de dirhams (environ 800 millions de dollars), dont environ 5,9 milliards de dirhams ont été alloués au contrat EPC (Engineering, Procurement, and Construction). Le projet a été développé par un consortium composé de Acwa Power (leader), Sener Ingeniería y Sistemas (Espagne), Sepco III Electric Power Construction Corporation (Chine), et Power China (Chine). Empresarios Agrupados, également basé en Espagne, a joué un rôle crucial en tant qu’ingénieur-conseil, tandis que la société Diseprosa (Espagne) assurait le conseil technique pour Masen, l’Agence marocaine pour l’énergie durable.

Le financement du projet a été soutenu par plusieurs institutions financières internationales, notamment la Banque africaine de développement (BAD), l’Agence française de développement (AFD), la Banque européenne d’investissement (BEI), la Banque mondiale, la KfW (Banque allemande de développement), et l’Union européenne.

Le Rôle de Masen et l’Impact des Problèmes Techniques

Masen, l’agence gouvernementale marocaine en charge de la transition énergétique, détient 25 % du projet à travers sa filiale Masen Capital. La société a signé un contrat d’achat d’électricité (PPA – Power Purchase Agreement) avec la Société de projet, garantissant un prix de vente de l’électricité de 1,42 dirham/kWh pendant les heures de pointe. Ce tarif est crucial pour la rentabilité du projet, mais l’arrêt prolongé de la centrale pourrait affecter non seulement les revenus des investisseurs, mais également les objectifs de production d’énergie du Maroc.

Les Répercussions Financières et la Réévaluation des Pertes

Le prolongement de l’arrêt de la Centrale Noor Ouarzazate III a des conséquences financières considérables. En plus des pertes liées à la production d’énergie manquante, le coût des réparations et de l’entretien a été plus élevé que prévu. Les pertes, initialement estimées à 47 millions de dollars, ont été réévaluées à plus de 51 millions de dollars. Ce montant inclut la perte de valeur de la centrale et les coûts associés à l’indisponibilité prolongée, dont 143,7 millions de rials saoudiens imputés à Acwa Power.

Vers une Reprise en 2025

En résumé, l’arrêt prolongé de la Centrale Noor Ouarzazate III constitue un coup dur pour le secteur des énergies renouvelables au Maroc. Bien que la technologie solaire thermique à concentration reste prometteuse, les incidents techniques comme celui survenu avec le réservoir de sels fondus mettent en évidence les défis associés à ces technologies avancées. La reprise des opérations de la centrale, prévue pour avril 2025, devra être suivie de près, afin de garantir que le projet pourra pleinement réaliser ses objectifs et continuer à fournir une énergie propre et fiable aux Marocains.

Le retard prolongé dans la mise en service de la centrale pourrait également affecter la crédibilité des projets futurs dans le domaine des énergies renouvelables au Maroc, même si le pays reste résolument engagé dans sa transition énergétique.

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