
Le 13 février 2025, l’écrivain algérien Kamel Daoud a été assigné en justice en France par Saâda Arbane, une femme algérienne qui l’accuse de non-respect de la vie privée et de vol de son histoire. La plaignante soutient que l’auteur de « Houris », son dernier roman couronné par le prix Goncourt 2024, aurait utilisé son récit personnel pour construire l’intrigue de son œuvre, sans son consentement et en violant sa vie privée.
Une accusation de vol d’histoire
Saâda Arbane, dont le nom reste jusqu’ici relativement discret sur la scène médiatique, affirme que l’histoire racontée dans « Houris » s’inspire fortement de sa propre expérience de vie, et que de nombreux éléments de son récit personnel ont été intégrés dans le roman sans qu’elle en soit informée. L’accusation se base notamment sur des détails précis de la vie de la plaignante, qu’elle considère comme étant trop ressemblants pour être une simple coïncidence.
Le roman « Houris », publié en 2024, raconte l’histoire de femmes algériennes confrontées aux défis sociaux, religieux et familiaux, une thématique qui aurait résonné avec l’expérience de Saâda Arbane. Selon cette dernière, plusieurs événements et situations narrés dans le livre seraient basés sur des événements réels de sa propre vie, ce qu’elle juge être une appropriation non autorisée de son histoire personnelle.
Le roman « Houris » et son succès
« Houris » a été largement salué par la critique et a remporté le prestigieux prix Goncourt 2024, un succès incontestable pour Kamel Daoud, qui est déjà un auteur reconnu internationalement pour ses écrits, notamment « L’Algérie de l’autre côté » et « Mersault, contre-enquête ». Son dernier roman a été décrit comme un regard poignant sur la condition des femmes dans le monde arabe, abordant des thèmes tels que la liberté, la sexualité et l’oppression.
Cependant, alors que le livre a été accueilli avec enthousiasme, cette plainte soulève de nouvelles questions sur les frontières de la fiction et la vie privée. L’accusation portée par Saâda Arbane remet en cause la relation entre l’écrivain et la réalité, et soulève le débat sur les limites entre l’inspiration personnelle et le respect de la vie privée des individus.
Les implications juridiques et éthiques
L’affaire est d’autant plus complexe qu’elle touche aux questions de propriété intellectuelle et de droits d’auteur, mais aussi aux limites de la liberté créative d’un écrivain. Si Saâda Arbane parvient à prouver que certains éléments du livre proviennent directement de son expérience, cela pourrait constituer une violation de son droit à la vie privée, ainsi qu’une appropriation non autorisée de son récit personnel.
Pour Kamel Daoud, cette accusation constitue un défi juridique important. L’écrivain pourrait se défendre en arguant que son travail est une œuvre de fiction et qu’il n’a pas utilisé de manière directe ou intentionnelle des éléments personnels de la vie de Saâda Arbane. Cependant, si le tribunal considère que l’écrivain a effectivement utilisé des événements réels dans son livre sans consentement, cela pourrait ouvrir la voie à des conséquences juridiques lourdes, voire à une compensation financière pour la plaignante.
Réactions et conséquences possibles
L’affaire, qui est encore au stade préliminaire, risque d’avoir un impact important sur la carrière de Kamel Daoud, dont l’œuvre est souvent considérée comme un pilier de la littérature contemporaine arabe. En outre, le processus judiciaire pourrait remettre en question les relations entre l’écrivain et ses sources d’inspiration, tout en soulevant des interrogations sur la protection des droits des individus dans les œuvres littéraires.
D’un autre côté, l’affaire pourrait également attirer l’attention sur les défis éthiques auxquels sont confrontés les auteurs lorsqu’il s’agit de traiter de récits personnels, en particulier lorsqu’il s’agit de thèmes aussi sensibles que la vie privée et les expériences individuelles.
L’assignation en justice de Kamel Daoud par Saâda Arbane pour vol d’histoire dans le cadre de la publication de son roman « Houris » marque un tournant dans la relation entre fiction et réalité dans la littérature contemporaine. Cette affaire, qui implique des questions juridiques, éthiques et personnelles, pourrait avoir des répercussions sur la manière dont les écrivains abordent leurs sources d’inspiration et sur les limites de leur liberté créative. Le verdict de cette affaire pourrait non seulement redéfinir les contours du droit à la vie privée, mais aussi modifier les règles du jeu dans la littérature d’aujourd’hui.