La question du Sahara marocain demeure l’un des conflits les plus complexes et les plus anciens du monde, marqué par des décennies d’affrontements diplomatiques, militaires et géopolitiques. Lors d’une rencontre organisée la semaine dernière à la Faculté des lettres et des sciences humaines de Rabat, le thème « La question du Sahara marocain à la lumière des transformations diplomatiques et géopolitiques » a été abordé avec un éclairage particulier, celui de Mahjoub Salek, un des fondateurs du Front Polisario et coordinateur de la faction dissidente Khatt Achahid (Ligne du Martyr).
Lors de cet événement, Mahjoub Salek a livré un témoignage inédit qui a permis de mieux comprendre les origines du mouvement séparatiste et l’instrumentalisation dont il a été l’objet par certaines puissances étrangères. Ses propos ont jeté un éclairage nouveau sur l’évolution du conflit, tout en soulignant les transformations géopolitiques en cours, qui pourraient influencer la trajectoire future de la question du Sahara.
Les Origines du Conflit et l’Instrumentalisation par des Puissances Etrangères
Mahjoub Salek, à travers son témoignage, a retracé l’évolution du conflit du Sahara marocain, mettant en lumière ses origines et les raisons pour lesquelles le Front Polisario a été créé. Selon Salek, le mouvement séparatiste a été en grande partie instrumentalisé par des puissances étrangères qui ont voulu exploiter cette situation pour servir leurs propres intérêts stratégiques dans la région du Maghreb et au-delà.
Le Front Polisario, fondé en 1973 par des militants sahraouis, a d’abord été perçu comme une organisation de lutte pour l’indépendance du Sahara Occidental, une ancienne colonie espagnole annexée par le Maroc après le retrait de l’Espagne en 1975. Toutefois, dans ses déclarations, Salek a précisé que les soutiens internationaux, principalement en provenance de l’Algérie et d’autres pays de la région, ont considérablement influencé la trajectoire du mouvement, transformant une lutte locale en un conflit géopolitique complexe.
Le soutien d’Alger au Front Polisario, qui a consisté en des aides matérielles et diplomatiques, a été un élément clé dans la prolongation du conflit, selon Mahjoub Salek. Il a également abordé les pressions exercées par certaines puissances étrangères pour maintenir la guerre en cours, en raison de leurs propres calculs géopolitiques.
Les Transformations Géopolitiques : Un Nouveau Contexte pour le Conflit
Dans son analyse, Mahjoub Salek a également évoqué les transformations géopolitiques récentes dans la région, qui ont bouleversé les équilibres et redessiné la carte politique du Maghreb. L’une des évolutions majeures réside dans la normalisation des relations diplomatiques entre le Maroc et plusieurs pays arabes et africains, notamment avec le monde arabe du Golfe et Israël, qui a renforcé la position du Maroc sur la question du Sahara.
Salek a souligné qu’aujourd’hui, la majorité des pays africains et arabes reconnaissent la souveraineté marocaine sur le Sahara, un soutien renforcé par des démarches diplomatiques et des accords stratégiques, dont notamment les Accords d’Abraham avec Israël en 2020. Ces évolutions ont mis en lumière l’isolement du Front Polisario sur la scène internationale.
Plaidoyer pour le Plan d’Autonomie
Malgré le soutien persistant d’Alger au Front Polisario, Mahjoub Salek a exprimé sa conviction que le Maroc, qui a réalisé des percées diplomatiques majeures ces dernières années, doit désormais aller plus loin dans la mise en œuvre du plan d’autonomie qu’il a proposé pour résoudre le conflit du Sahara. Ce plan d’autonomie, soutenu par l’ONU et plusieurs grandes puissances internationales, préconise une autonomie large du Sahara sous la souveraineté marocaine, et semble être la solution la plus réaliste et viable au conflit.
Salek, qui a pris ses distances avec le Front Polisario après avoir critiqué sa direction et ses choix politiques, a précisé que le plan d’autonomie pourrait constituer une solution politique durable, en permettant à la population sahraouie de gérer ses propres affaires tout en restant sous la souveraineté marocaine.
Dérives au Sein du Polisario : Les Voix Dissidentes
Il a également souligné qu’il y avait une évolution au sein du Front Polisario, avec de plus en plus de voix dissidentes qui s’élèvent pour dénoncer les dérives du mouvement séparatiste. Selon lui, le Polisario ne représente plus aujourd’hui les intérêts des Sahraouis de manière authentique, ayant été corrompu par des jeux de pouvoir internes et par des influences extérieures. Ces voix dissidentes au sein du mouvement plaident désormais en faveur d’une solution politique négociée et non d’une poursuite de la lutte armée.
En dénonçant les dérives et les abus de pouvoir au sein du Polisario, Salek a fait un appel à une réflexion collective sur le devenir de la question sahraouie, en insistant sur le fait que seule une solution politique consensuelle pourrait permettre de mettre fin à ce conflit long de plusieurs décennies.
Vers une Solution Politique Durable ?
Le témoignage de Mahjoub Salek lors de cette rencontre à Rabat a permis d’éclairer les origines du conflit du Sahara et les dynamiques géopolitiques qui ont prolongé la lutte. Sa prise de position en faveur du plan d’autonomie et de la réconciliation des Sahraouis sous l’autorité marocaine a mis en lumière une nouvelle approche possible pour résoudre ce conflit, en soulignant l’importance de dialoguer et de mettre en œuvre des solutions politiques pragmatiques.
Alors que le Maroc semble avoir gagné des soutiens internationaux importants dans la question du Sahara, notamment à travers des accords diplomatiques avec de nouveaux partenaires stratégiques, le conflit reste un défi majeur pour la stabilité et l’unité régionale. Toutefois, les voix dissidentes au sein du Front Polisario et la montée des appels à une solution politique pourraient offrir un espoir de rapprochement et de résolution pacifique dans un futur proche.
