
Rabat, juin 2025 – Dans un rapport stratégique publié en juin 2025, l’Institut marocain d’intelligence stratégique (IMIS) alerte sur une crise hydrique structurelle, menaçant la souveraineté nationale. Bien au-delà d’un simple problème environnemental, la pénurie d’eau s’établit en danger de toute l’économie et du modèle de développement du Royaume.
🌡️ Une crise multifactorielle
Selon l’IMIS, le déficit en eau résulte de :
- Stratégies agricoles intensives telles que le Plan Maroc Vert et Génération Green, qui consomment 86 % des prélèvements nationaux, contribuant à 35–40 % du déficit hydrique (2,5–3 milliards m³/an).
- Déclin des ressources renouvelables : de 2 600 m³/habitant/an dans les années 1960 à à peine 600 m³ en 2025 — seuil de stress hydrique sévère, un possible manque absolu d’eau d’ici 2035–2040.
- Surexploitation des nappes : dépressions de plus d’un mètre par an, jusqu’à 3 m dans le Souss
- Barrages encrassés : seuls 32 % de leur capacité utile sont remplis, et les ouvrages majeurs comme Al Massira sont à 3,7 %
- Changement climatique : sécheresses persistantes, chute de 20 % des apports superficiels et évaporation accrue de 1,5 million m³/jour .
📉 Conséquences économiques majeures
Sans reformes urgentes, le Maroc pourrait perdre jusqu’à 6,5 % de son PIB d’ici 2050, selon l’IMIS. La pression hydrique menace directement :
- L’agriculture – poumon économique du pays (14 % du PIB, 35 % des emplois) ;
- L’approvisionnement urbain – la population en croissance met les réseaux urbains à rude épreuve ;
- Le tourisme et l’industrie – forts consommateurs d’eau.
🧠Gouvernance fragmentée et données lacunaires
Le rapport remet sévèrement en cause la gestion de l’eau :
- Conseil supérieur de l’eau et du climat inactif depuis 2001 ; Agences de bassins inefficaces, manquant de moyens et de pouvoir ;
- Déficit massif de données hydriques standardisées, rendant impossible une planification éclairée
🔟 Dix recommandations-clés de l’IMIS
Pour rétablir la souveraineté hydrique, le think tank propose :
- Refondation d’un Conseil national de l’eau avec autorité politique.
- Tarification conditionnée à l’efficacité hydrique des cultures.
- Création d’une Autorité nationale de l’eau indépendante.
- Plateforme nationale de données hydriques ouverte.
- Objectif de 1,5 Md m³/an d’eaux non conventionnelles (dessalement, recyclage).
- Réseaux urbains intelligents pour réduire les fuites.
- Développement de la HydroTech au Maroc.
- Gouvernance participative des bassins.
- Éducation à la sobriété hydrique dès l’école.
- Instruments financiers verts pour projets durables.
🌍 Le Maroc est-il au bord du gouffre ?
Oui, avertit le rapport : le modèle actuel, basé sur l’augmentation de l’offre hydraulique et l’irrigation intensive, n’est plus tenable. La résilience passe par une transformation radicale de la gouvernance, de la demande et des ressources. Le temps presse : sans cette réforme, le Royaume risque de toucher un seuil de pénurie critique dès 2035.
✅ En route vers un nouveau modèle hydrique
Le défi est double : adapter l’agriculture à la rareté, et moderniser la gestion de la ressource. L’impulsion politique existe : Sa Majesté le Roi Mohammed VI a déjà orienté les priorités vers le dessalement, la réutilisation des eaux usées et la modernisation.
Mais sans restructuration institutionnelle ni données fiables, le Maroc pourrait bien perdre son pari — et son eau.
📌 Pour en savoir plus : consultez le rapport complet de l’IMIS, « Eau et climat : le Maroc à la croisée des chemins » (juin 2025).